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Cameron ressources humaines

Pierre-Luc Trudel

Pierre-Luc Trudel

  2015 | 11 | 02

Quand l’incivilité plombe la productivité

En quoi consiste l’incivilité dans un contexte de travail?
L’incivilité est un comportement déviant, de faible intensité, violant les formes de respect en vigueur sur les lieux de travail. En fait, il s’agit d’une forme légère de violence psychologique qui consiste à ne pas avoir de respect ni de considération pour les autres. Quand ils étaient jeunes, les gens ont appris cinq mots magiques : bonjour, merci, s’il vous plaît, au revoir et excusez-moi. Malheureusement, dans les organisations où il y a peu de civilité, beaucoup d’employés semblent les avoir oubliés.

Et la civilité?
Politesse, courtoisie, collaboration, respect et savoir-vivre font partie de la civilité, mais ça va au-delà de cela. C’est aussi une question d’intention. Une personne peut être polie, mais hypocrite dans sa politesse. Par exemple, dire bonjour à quelqu’un, mais sans lui sourire ni même le regarder.

L’incivilité est réellement une problématique dans les entreprises?
Oui, tout à fait. Selon une étude de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA) publiée en mai dernier, 40 % des répondants ont qualifié le climat de travail de leur organisation comme étant moyennement civil ou incivil. En résumé, ça veut dire que dans 40 % des milieux de travail, l’incivilité est une problématique. Et le phénomène semble être en hausse, ce qui est plutôt inquiétant.

Comment les employés en viennent-ils à accepter de travailler dans de telles conditions?
Il y a beaucoup d’indifférence, et parfois un manque de courage. La collaboration, c’est travailler ensemble, mais aussi se dire comment on se sent de manière adéquate. Certains employés font des choses sans se soucier de l’effet que cela peut avoir sur leurs collègues de travail. À mon avis, notre société a perdu l’habileté de se dire les vraies affaires. C’est exigeant de dire à l’autre qu’on est déçu ou fâché de son comportement. Plutôt que de faire comprendre aux personnes ayant un comportement inadéquat l’impact négatif qu’ils ont sur le climat de travail, les gens les excluent et ne leur parlent plus.

Il revient donc aux employés de s’assurer que le climat de travail leur convient?
Le défi est à deux niveaux. D’un côté, les employés doivent avoir le courage de dire non aux comportements inacceptables de leurs collègues et exprimer clairement leurs besoins et leurs limites. De l’autre, les gestionnaires ne doivent pas avoir peur d’intervenir et de faire en sorte que les employés règlent leurs conflits, malgré les difficultés que cela comporte. C’est ainsi qu’ils réussiront à consolider leurs équipes.

Mais les gestionnaires ont-ils vraiment tous les outils pour intervenir adéquatement?
Selon mon expérience auprès des gestionnaires, quelque 70 % de ceux-ci veulent du coaching sur la résolution de conflits et sur les façons d’amener leur équipe à collaborer davantage. Leurs principales préoccupations ne concernent pas les opérations et l’administration. Cela dit, montrer l’exemple est déjà un bon point de départ. J’ai souvent vu des directeurs qui envoyaient promener leur personnel. C’est sûr que par la suite, les employés vont faire la même chose entre eux. L’autorité pure et simple, ça ne fonctionne pas non plus. Ça ne sert à rien d’obliger les gens à se dire bonjour s’ils ne comprennent pas pourquoi on leur demande ça, quel est l’impact d’un tel comportement sur les gens et sur l’entreprise.

 

On peut quand même se demander jusqu’à quel point l’employeur est vraiment responsable du niveau de civilité de ses employés…
La responsabilité des employeurs, c’est de mettre en place les règles du jeu, auxquelles l’adhésion n’est pas facultative, en vue de favoriser un climat de travail sain. Ils ne sont pas responsables du comportement des gens quand ceux-ci sont à la maison, mais lorsqu’ils sont sur le lieu de travail, oui, ils ont une certaine responsabilité. Ils ont des équipes à gérer et doivent les amener à performer. Ça fait aussi partie de leur rôle de gérer le climat de travail. Au printemps, j’ai été appelée à intervenir dans un centre hospitalier où il y avait beaucoup de clans et de commérages au sein d’une équipe, ce qui créait un climat malsain. Les gestionnaires n’arrivaient plus à faire cesser tout ça. Passer d’une culture où les gens s’envoient promener à une culture où ils collaborent, c’est possible. Mais la haute direction doit vraiment agir à titre d’ambassadrice dans la démarche.

Qu’est-ce que les organisations peuvent faire pour améliorer le climat de travail?
Dans les équipes où les résultats ont été concluants, on a réuni les employés et les gestionnaires et on leur a demandé d’écrire un ou deux comportements qu’ils aimeraient voir chez leurs collègues pour maintenir un bon climat de travail. Ensemble, ils ont ensuite ouvert le dialogue pour définir des normes qui devraient dorénavant être appliquées par tous. C’est ce qu’on appelle une charte d’équipe. Quand une organisation veut changer sa culture, elle doit parler des valeurs, mais celles-ci doivent être associées à des comportements, qui sont des indicateurs. Tous les employés doivent reconnaître qu’ils sont coresponsables à la fois des résultats de l’entreprise et du climat de travail.

Les entreprises doivent donc élaborer des normes strictes concernant la civilité?
Oui. Dans les organisations où il n’y a aucune politique ou charte, les gens basent leur comportement sur leurs valeurs personnelles. Cela dit, la plus grande difficulté est surtout de les mettre en application. La plupart des entreprises ont déjà des politiques au sujet de la civilité, mais elles ont de la difficulté à les faire appliquer par le personnel. Les gestionnaires doivent faire des rappels constants. Changer un climat de travail et des habitudes demande du temps, il faut répéter et persévérer. Tous doivent contribuer, de l’employé à la haute direction, en passant par les gestionnaires et les responsables des ressources humaines.